Live report Karen Elson+Mai@La Boule Noire, 24 septembre 2010

Une belle soirée surréaliste vendredi dernier, où l’on a longtemps attendu la belle arlésienne, Karen Elson (viendra?viendra pas?). C’est bien simple, on se serait presque cru à un vieux concert des Guns, si l’organisateur de la soirée n’était pas venu nous expliquer, vers 22h, que le tour bus de Miss Elson était tombé en panne et qu’ils étaient à soixante bornes de Paris….Autant dire, ce n’était pas gagné…

Mais revenons au début de cette belle soirée chaotique, pleine de surprises et de rebondissements…

ça commence avec le très beau set de MAI, alias Johanna Wedin, jeune et jolie suédoise exilée à Paris, à la voix de princesse cristalline, qui n’est pas sans rappeler les émois mutins de Sol Seppy ou Hope Sandoval. Accompagnée par un guitariste délicat, qui enveloppe sa douce voix de fée, d’arpèges lumineux, nostalgiques, et de samples discrets, du plus bel effet, le folk aérien de MAI s’écoute les yeux fermés, comme un rêve éveillé, enfantin et charmant. Pleine de grâce et d’humour, la jolie Johanna tient la scène de son allure gracile et sensuelle, lance des petites blagues, déstabilise son guitariste, balance des regards mutins, et met ainsi le public dans sa poche avec une classe infinie et une grande humilité. Avec une voix vraiment sublime qui accompagne des morceaux originaux et lumineux, MAI a tout d’une très grande, et le duo se permet même, en fin de set, une reprise du cultissime « Si Tu Dois Partir » de Fairport Convention, tout en douceur, et la filiation parait alors plus qu’évidente. Pour moi, c’est une grande découverte.


Après MAi, le flou artistique s’installe. Mais où est donc Karen Elson? Sur la scène vide, rien n’est installé, et tout porte à croire que la jolie rousse risque de ne pas pointer le bout de son nez mutin.

Vers 22h, l’organisateur monte sur scène et annonce que Karen est sur la route depuis 24 h, problème de bus, mais qu’elle veut absolument faire ce concert. On nous propose d’attendre jusqu’à 23h. Certains partent, crient « remboursé! » (ah les parisiens…), nous restons sagement, profitant de l’aubaine, espérant que ce contre temps jouera en la faveur de Miss Elson, qui risque de proposer un concert assez unique et particulier.

On ne sera pas déçu.

Vers 23h, toujours pas de Karen, mais on nous annonce qu’elle est sur la route et propose de payer un coup à toute la salle, pour nous faire patienter. Rassuré, le peuple assoiffé se rue vers le bar, et j’élimine quant à moi l’option Axel Rose. Cette fille a l’air bien sympa. Respect du public et tout et tout. Plutôt classe. ça promet.

Finalement vers 23h30, les musiciens entrent en grande pompe et presque en courant, par la grande porte (pas d’entrée des artistes à la Boule Noire?) suivi de Karen Elson, grande silhouette longinine, toute de noir vêtue, perchée sur d’interminables talons aiguilles.

Miss Elson et son groupe s’installent direct, font un line check de deux minutes trente, en plaisantant avec le public de leurs mésaventures (« un cauchemar », répète Karen, en souriant), puis attaque direct sur « The Ghost Who Walks » en acoustique, brut et superbe. On est scié par autant d’humilité et d’efficacité.

S’exprimant en français entre les morceaux, Karen présente, en souriant, son groupe, précisant que ce soir, le pauvre batteur se retrouve réduit à jouer des petites percussions, faute de temps pour installer la batterie. Le groupe enchaîne ensuite les morceaux de l’album de Karen Elson, les arrangements réduits au stricte nécessaire (un accordéon, un violon, une basse et deux guitares), les titres nostalgiques et délicats de l’album n’en ressortent que grandit. La voix élégante et impeccable ne bouge pas. Grande leçon de professionnalisme, et une fois de plus, d’humilité. Karen Elson se met à l’aise. Elle se débarrasse de ses talons aiguilles, bel instrument de torture (« Who need shoes anyway? ») communiquant chaleureusement avec le public ébahi et complètement sous le charme de cette sublime anglaise, (pas étonnant qu’elle ai été l’égérie des plus grands photographes et couturiers de son époque) à la fois féline, chaleureuse et sensuelle.

Rien à dire quant à l’efficacité et la beauté de ce concert anachronique qui semble presque improvisé (ce qui n’est bien évidement pas le cas), où Karen règne en maîtresse dominatrice, réinventant sa set list à la dernière minute.

En fermant les yeux, on a l’impression d’être transporté dans le désert du far west, apercevant au loin les silhouettes pleine d’allure et de panache de Gary Cooper ou John Wayne, sur leur beau cheval cendré. Ces morceaux là nous rappellent l’Amérique qu’on aime, fière, sensible et captivante, et on a bien envie de rejoindre la belle Karen dans ce trip nostalgique mais jamais passéiste, plein de grâce et de fantômes perdus.

En rouvrant les yeux, Karen aura disparu, après un rappel et deux morceaux. Mais comme un retour à la réalité de ce concert atypique et « improvisé », elle revient, deux minutes plus tard, récupérer, en riant, son sac à main Dior, qu’elle avait abandonné sur scène, en hâte, à son arrivée …

Un moment assez unique et touchant.

Photos: Stéphane Dalle (galerie complète ici)




(Un grand merci à S.D, my favourite wizard, qui parvient toujours à capter la grâce et l’énergie, même dans les salles les plus sombres…)

3 Commentaires

  1. L’article et les photos sont cool ! comme d’hab :D

    Ps: je parie qu’on a jamais pris une photo aussi rock’n’roll du pied de Karen Elson de toute sa carrière ;)

  2. Alexielle dit :

    Très bon article, ça résume super bien la soirée! J’en garde un merveilleux souvenir, finalement elle a su faire de ce contre-temps un « plus », le côté urgent et faussement improvisé du concert l’a rendu unique…

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