Une soirée quelque peu surréaliste ce Lundi de Pentecôte, où le Saint Esprit du rock’n’roll semble être parvenu jusqu’à cette petite cave du Klub, déjà bondée à 20h, malgré une chaleur tonitruante. Sur les conseils de Miss Audrey Horne, (excellente chanteuse des Native Nothing), je suis venue découvrir les fameux Lolito. Mais nous tombons, dans un premier temps, nez à nez avec le folk mélancolique et délicat de Odds & Ends, duo, acoustique donc , emmené par une voix rocailleuse et poignante qui évoque souvent Tom Waits ou Mark Lanegan. Le duo est vite rejoint par une voix féminine qui harmonise le tout en douceur (parfois peut être un peu trop à mon goût). Les jolies ballades dépressives du duo mériteraient, peut être, à certains moments, une interprétation un peu plus abrupte et incisive, pour vraiment parvenir à toucher nos coeurs de rockers, à la manière du duo Isobel Campbell / Mark Lanegan. Mais, ne soyons pas trop difficile, tout cela était quand même bien joli, soigneux et touchant.
Changement de plateau rapide et on enchaine sur Every Man Has Your Voice (soirée très bien organisée et pensée, car les groupes se succèdent de manière plutôt cohérente. Ce n’est pas toujours le cas malheureusement). Malgré un nom un peu compliqué à retenir pour les pauvres frenchy parisien que nous sommes, le groupe se révèle être une bonne surprise. Se qualifiant eux même de « folk bidouille » (et ça leur va plutôt bien), Every Man Has Your Voice pratique donc un genre de folk rock habité et tarabiscoté où se mélange pas mal d’influences diverses et variées (Arcade Fire, Mogwai, Radiohead, Overhead, José Gonzalès…) Du très bon folk indé, avec un chanteur plutôt charismatique et envoûtant. Les interventions du ukulélé sont du plus bel effet et on se retrouve bien emballé par leurs morceaux cultivés, à la fois tristes et planants.
A peine le temps de prendre un bol d’air pas encore très frais en haut des escaliers, que le set des Lolito commence déjà. En voilà une belle découverte: deux filles (une brune, une blonde platine) tiennent la baraque (chant/ clavier/ basse), soutenues par leurs acolytes masculins (guitare/ batterie) et ça décoiffe. Un set trop court,(c’est bon signe), des morceaux à la fois fun, légers, dansant et déjantés qui ont l’étoffe de tubes (« Hold Me Kiss Me », « B.A.S.T.R.D »). Mon petit doigt me dit qu’on a pas fini d’entendre parler des Lolito. Emmené par le charisme déjanté de la jolie chanteuse blondissime à la voix haut perchée, les Lolito nous embarquent dans un joyeux trip, sexy, décalé et touchant, évoquant la face « happy » des riot grrl (Le Tigre, Bratmobile) et la folie post punk des B 52’s. Gonflés, ils parviennent même à faire le grand écart en se mesurant avec brio à la mélancolie indé de Blonde Redhead sur un morceau qui aurait très bien pu être écrit par le groupe new yorkais lui même. De ce petit concert, on en ressort donc le sourire aux lèvres, et l’envie de danser encore sur leurs titres électriques, complètement irrésistibles.
Dur Dur de faire mieux après cela, et c’est Des Ark (de son vrai nom Aimee Argote) qui s’en charge. Une américaine à Paris, qui joue un folk poignant à la Shannon Wright. Une très jolie voix généreuse et inspirée, une guitare délicate, des morceaux sincères, tristes, plein de rage sous jacente et de désespoir vibrant. Entière et aventureuse, Aimee nous propose même de sortir dans cette chaude soirée afin de l’écouter jouer dehors, sans la distance de la scène, qui semble la gêner pour communiquer ses émotions à vif. En bon disciple (normal un jour de Pentecôte), nous la suivons donc sagement sur le parvis de Beaubourg et la soirée, brûlante et étrange, prend alors un cap surréaliste. Nous nous retrouvons tous assis par terre, en plein Paris sauvage et bruyant, à écouter délicatement Des Ark nous prêcher sa bonne parole, bien aidée par sa jolie guitare… Il y a des jours comme ça, où on ne regrette pas d’être sortie de chez soi….